Aux Etats-Unis
Carnet
Depuis notre base paisible du Queens, nous partons pour la ville tous les matins, et commençons par épuiser tous les grands classiques. Qui se
pardonnerait de n’avoir pas vu La Liberté, le Metropolitan Museum, l’Empire State, le Stock Exchange… Les tours jumelles ne sont pas
encore un lieu de pèlerinage mais seulement les plus hauts bâtiments de la planète…
Petit à petit, la vision de la ville se modifie. Quel Univers ! Il s’avère que les new-yorkais sont fort accueillants et serviables. Moins stressés à
certains égards que nos concitoyens ; curieux de l’étranger et avenants. Mais comme partout, cela dépend des lieux, des moments, et reste
affaire de chance. Evitons de croire à la première rencontre que « toutes les anglaises sont rousses ».
Une certitude en revanche : l’immensité. Ne jamais commettre l’erreur, en regardant le plan, de croire que « c’est tout près ». Rien n’est près.
Manhattan mesure deux fois le diamètre de Paris et nous le découvrons tous les jours au péril de nos pieds.
Le métro est souvent incompréhensible, et les erreurs y coûtent cher en temps et en $. L’ambiance y est inquiétante : police omniprésente,
grilles et portiques dignes du secteur grands fauves d’une ménagerie, bruit infernal, couloirs sinistres… {A l’époque, les contrôleurs du métro de
Paris poinçonnent encore les tickets à la main, et ce sont eux qui régulent le flux de passagers. Gainsbourg les a immortalisés.} Pourtant, dès
que l’on parle aux gens, l’impression d’insécurité s’estompe, ils prennent le temps de répondre, d’aider, sont avenants. Leur anglais est même
souvent compréhensible. {Mais là encore, c’est davantage affaire sociale que géographique…}
Nous passerons le week-end chez un autre cousin immigré, « l’Oncle Jules », qui habite la grande banlieue. Son histoire à lui aussi est
emblématique de l’émigration européenne vers l’Amérique, de la fascination que ce pays a exercée sur nos proches ancêtres… Jules est régisseur
d’une grande propriété sise à Mount Kisko. 30 km de train de banlieue. Cela donne l’occasion de découvrir la gare « Grand Central » de
NY. De traverser Harlem, dont la visite en ces temps là est fortement déconseillée. Aux blancs surtout. Et d’ailleurs la vision qu’on en a depuis
les viaducs du train, qui rasent les immeubles décatis, ne donne guère envie de tenter sa chance. On dirait une séquence de West Side Story :
immeubles à l’abandon, piles de voitures en ruine sur lesquelles jouent des enfants, population intégralement noire. Le train lui-même donne le
ton : il est dans un état d’abandon lamentable avec ses fauteuils lacérés au couteau, ses rideaux arrachés…
A 30 km de là, de manière stupéfiante, c’est l’Amérique d’avant la Mayflower : à une distance où en banlieue parisienne s’aligneraient les
zones commerciales, ce n’est que forêt à perte de vue sur des collines déserte. Aussi loin que porte le regard depuis le parc de chez Jules, on ne
voit ni une maison, ni une route, ni une ligne électrique… Incroyable !